Pour ma première mise en scène, j'ai voulu me confronter à un texte du XXe siècle. Ayant auparavant découvert l'univers durassien à travers ses romans, ses écrits sur le théâtre et ses films, mon choix s'est finalement porté sur sa pièce Agatha, dont le texte m'a amené à remettre en cause les liens traditionnels entre l'image et la parole et à explorer l'impact de l'immobilisme des personnages et la valeur des silences. Agatha, publié en 1981, est représentatif de cette expression originale de l'écriture que son auteur a développée depuis son Ravissement. Ce premier travail m'a conduit à m'interroger sur le sens et la place des didascalies, qui dans ce texte rythment très souvent le flux des répliques et insistent constamment sur les statures rigides des protagonistes et sur les expressions et les timbres des voix. La distribution qui ne comporte que deux personnages m'a permis de me concentrer en priorité sur le jeu des comédiens et de créer avec le scénographe et l'éclairagiste un univers qui agit comme un vecteur de la parole.

Elle. - Je ne savais pas la différence qu'il y avait entre le regard de mon frère sur mon corps nu et le regard d'un autre homme sur ce corps. Je ne savais rien de cela, de mon frère, de ces choses interdites, ni combien elles étaient adorables, vous voyez, ni combien elles étaient à ce point contenues dans mon corps.

agatha - note d'intentions