Invité par les Concerts de Musique Contemporaine et par sa directrice artistique Mireille Bellenot à participer au Festival Luc Ferrari, j'ai imaginé un projet de lecture-vidéo autour des petites autobiographies fictives du compositeur. Luc Ferrari a régulièrement rédigé des notices biographiques dans lesquelles il se plaît, tout comme il le fait dans sa musique, à brouiller les pistes, à dire la contradiction, à défaire ce qui pourrait apparaître. Le terme autobiographies, au pluriel!, marque déjà une volonté d'échapper aux conventions. Avec ce projet, il s'agissait de donner à entendre la poésie, l'humour, la musicalité, l'histoire passée, le politique, l'érotisme, l'histoire à venir et les contradictions qui se dégagent de ces autobiographies. Connaissant son amour des femmes et son amour des paysages, ces lectures venaient s'ancrer dans un panorama vidéo réalisé par le plasticien Cyril Macq. Ce panorama en triptyque (deux projections juxtaposées qui se superposent à leur jonction) était un voyage à travers le corps de la femme. Par un travelling en gros plan, parcourant lentement et avec sinuosité les formes féminines et la texture de la peau, le regard du public plongeait dans un paysage irréel.

Luc Ferrari est né à Paris en 1929. Il s'interroge sur cette première phrase; d'abord 1929. Il a écrit de nombreuses autobiographies dans lesquelles il falsifiait les dates. L'écriture le rend fou, il ne faut pas lui demander ça. Et comme il n'osait pas se rajeunir, il se vieillissait. Il y a donc des tas de fausses dates qui courent, cela l'amusait à l'époque. Maintenant ça l'amuse beaucoup moins! Ensuite, né à Paris. Il s'interroge : être né Paris! Il se demande ce qu'il aurait été s'il était né dans le petit village de son père, en Corse. Il se demande ce qu'il aurait été s'il était né à Marseille, la ville de sa mère. Il se demande ce qu'il aurait été s'il était né en Italie, le pays de ses ancêtres. Et pour cela, il n'a aucune réponse.

autobiographies - note d'intentions