Pour cette seconde collaboration avec La Fanfare du Loup, il s'agissait de créer un spectacle tout public d'après le conte d'Alphonse Daudet. J'ai tout d'abord imaginé, en collaboration avec un des musiciens du groupe, la façon dont la musique pouvait entrer en résonance avec le texte. Chaque intervention musicale devait avoir ses motivations et caractéristiques propres: annoncer, soutenir ou clore l'atmosphère d'un passage, renforcer une tension dramaturgique (telle la dualité qui tiraille la chèvre à la nuit tombante), créer une polyphonie entre texte et musique. Le texte lui-même devait devenir musical, par l'utilisation de certains mots comme matière sonore et rythmique, ou encore par la mise en chanson d'un fragment du texte. Partant de ces indications, les compositeurs se sont mis au travail. Ensuite, l'enjeu principal sur le plateau a consisté à intégrer les musiciens aux divers rebondissements du conte. Tout d'abord simples spectateurs, assis sur une estrade, en miroir des "réels" spectateurs, ils s'insinuent peu à peu au conte, du saxo à la batterie sur roulettes, en passant par la contrebasse-grimpeuse, ils deviennent tour à tour chèvre, loup, Seguin mais aussi montagne, arbres, chamois, torrents, étoiles...

Tout à coup le vent fraîchit. La montagne devint violette; c'était le soir... "Déjà!" dit la petite chèvre, et elle s'arrêta fort étonnée. En bas, les champs étaient noyés de brume. Le clos de M. Seguin disparaissait dans le brouillard, et de la maisonnette on ne voyait plus que le toit avec un peu de fumée. Elle écouta les clochettes d'un troupeau qu'on ramenait, et se sentit l'âme toute triste... Un gerfaut, qui rentrait, la frôla de ses ailes en passant. Elle tressaillit... Puis ce fut un hurlement dans la montagne...

la chèvre de M. Seguin -
note d'intentions